Les employeurs inquiets des limites des dispositions de la Loi sur la santé et la sécurité au travail en matière de harcèlement au travail, L.R.O. 1990, chap. O.1, peuvent pousser un soupir de soulagement. Deux décisions récentes de l’Ontario ont clairement indiqué que la conduite grossière et les remarques blessantes ne sont pas nécessairement synonymes de « harcèlement en milieu de travail». Ils ont également confirmé que le harcèlement en milieu de travail n’a pas d’incidence émotionnelle sur l’employé, mais plutôt des éléments de preuve objectifs sur la conduite de l’employeur.
L’article 1(1) de la Loi sante et la sécurité au travail définit le « harcèlement » comme s’engager dans un processus de commentaires ou de comportements vexatoires à l’endroit d’un travailleur dans un milieu de travail que l’on sait ou qui devrait raisonnablement être connu pour être inapproprié, y compris le harcèlement sexuel en milieu de travail. Sur la base de cette définition, on pourrait faire valoir que la question de savoir si la conduite est inappropriée dépend, du moins en partie, des sentiments subjectifs du destinataire de la conduite. Ce n’est pas le cas, la jurisprudence récente a statué.
Dans Opseu et Ontario (Ministère du solliciteur général) (Barker), Re, 2020 Carswell Ont 1612, la Commission de règlement des griefs de l’Ontario s’est demandé si un cas prima facie de harcèlement en milieu de travail pouvait être fait contre un gestionnaire relativement à une déclaration qu’elle avait faite au plaignant, un employé. Selon l’employée, la gestionnaire lui a dit que sa participation à la médiation impliquant deux de ses collègues avait été demandée par les deux collègues, alors qu’elle était vraiment recommandée par un consultant engagé par l’entreprise. L’employée a soutenu qu’elle avait été amenée à participer à la médiation, ce qui a finalement nui à sa relation avec ses collègues.
La Commission a rejeté ces arguments, est-ce que la conclusion que le harcèlement doit être évalué objectivement et implique un usage négligent ou inapproprié du pouvoir, un écart par rapport à la norme ou un mépris imprudent des droits d’une autre personne. En l’espèce, même une affaire prima facie n’a pas pu être portée contre le gestionnaire sur la base des faits allégués. Les détails ont établi que l’employée se sentait harcelée par le gestionnaire et qu’elle avait beaucoup souffert à la suite de l’incident, mais cela n’a pas suffi. La gestionnaire, qui agissait dans le cadre de ses responsabilités de gestion, a laissé à l’employée l’impression erronée que la médiation avait été demandée par les deux collègues. Il ne s’agissait pas d’un cas où l’on pouvait dire que le gestionnaire aurait dû savoir mieux.
Plus récemment, à l’OECTA et au Kenora Catholic District School Board (Demers), Re, 2021 Carswell Ont 741, un arbitre est sans doute allé encore plus loin, jugeant qu’une conduite inappropriée qui avait pour effet d’embarrasser et d’offenser profondément un enseignant n’a pas atteint le niveau de harcèlement en milieu de travail. Le plaignant était un enseignant itinérant enseignant une leçon aux élèves de cinquième année (environ 20 en nombre) d’une classe divisée de cinquième/sixième année. Les élèves de sixième année (environ cinq en nombre) avaient déjà été affectés à leur travail avant l’arrivée du plaignant. Ils étaient assis à l’arrière de la classe, encadrés par deux assistants d’éducation. Le directeur de l’école est venu observer la leçon et a supposé à tort que les élèves de sixième année ne prêtaient pas attention à la leçon. Après que le plaignant a informé le directeur de la situation, le directeur a cherché à sauver la face en prétendant qu’il y avait un problème de bruit et a ordonné à tous les élèves de poser leurs crayons et d’écouter le plaignant. Les élèves ont été troublés par la situation et le plaignant a été profondément offensé et embarrassé.
L’arbitre a conclu qu’il avait été inutilement embarrassé en raison de l’erreur du directeur et de ses efforts insensés subséquents pour couvrir l’erreur. Bien qu’il soit compréhensible que le plaignant se soit senti aussi offensé que lui, et mêmes la conduite du directeur était inappropriée, elle n’a pas été à la hauteur du harcèlement. L’arbitre a conclu que toute action déraisonnable, inappropriée ou imprudente de la direction constitue du harcèlement, même lorsque de telles mesures causent de l’embarras à l’employé et l’offensent.
Ces décisions de bon sens apportent une certaine clarté aux limites précises des dispositions de la Loi de la sante et la sécurité au travail relatives au harcèlement en milieu de travail. Il ne suffit pas que les sentiments d’un employé soient blessés ou que l’employé soit embarrassé par la conduite de l’employeur. La vraie question est de savoir si l’employeur, objectivement parlant, aurait dû savoir mieux dans les circonstances. Malheureusement (ou heureusement, du point de vue d’un avocat), les gens raisonnables peuvent être en désaccord quant à savoir si un employeur aurait dû savoir mieux dans un cas donné. Le résultat est que nous pouvons certainement nous attendre à voir plus de cas traitant des limites du harcèlement en milieu de travail à l’avenir.